Prescription : la computation des délais de procédure ne s'applique pas

Les règles de computation des délais de procédure, prévoyant que le délai expire à la fin du jour portant le même quantième que celui du point de départ, sont sans application en matière de prescription.

 

Les règles de calcul des délais de prescription sont encadrées par les articles 2228 et 2229 du code civil. Selon le premier de ces textes, la prescription se compte par jours, et non par heures, tandis que le second prévoit qu?elle est acquise lorsque le dernier jour du terme est accompli. La computation des délais de procédure obéit, quant à elle, à des règles différentes énoncées par les articles 641 et 642 du code de procédure civile. L?article 641, alinéa 2 pose en effet que le délai exprimé en mois ou en années expire le jour du dernier mois ou de la dernière année qui porte le même quantième que le jour de l?acte, de l?événement, de la décision ou de la notification qui fait courir le délai. L?article 642 ajoute que le délai expire le dernier jour à 24 heures, d?où il s?infère que le jour de l?échéance est compris dans le délai, la formalité ou l?acte ne pouvant dès lors être accompli le jour d?après.
L?arrêt rapporté, largement diffusé, répond à la question de savoir si les modes de computation des délais de procédure s?appliquent en matière de prescription. Comme par le passé (Cass. com., 10 janv. 2006, n° 04-10.482 ; Cass. com., 27 mars 2007, n° 05-21.326 ; Cass. 2e civ., 7 avr. 2016, n° 15-12.960), la réponse de la Cour de cassation est clairement négative. La prescription étant acquise lorsque le dernier jour du terme est accompli, il en résulte que l?action en paiement, dont le délai quinquennal de prescription a commencé à courir le 19 juin 2008 à 0 heure, est prescrite le 18 juin 2013 à 24 heures et non le 19 juin à 24 heures.
En l?espèce, une société confie à un agent immobilier le mandat de rechercher tous types d?immeubles en vue d?un achat. Une promesse de vente prévoyant le règlement, par l?acquéreur, d?une commission, au profit de l?agent immobilier, est consentie au mandant sous signature privée. Mais le mandant refuse de réitérer la vente par acte authentique et il est condamné à payer une somme au titre de la clause pénale. Le 19 juin 2013, l?agent immobilier assigne le mandant en paiement de la commission convenue. Pour sa défense, le mandant fait valoir que l?action en paiement intentée à son encontre est prescrite.
La cour d?appel juge que le délai quinquennal a commencé à courir à compter du jour de l?entrée en vigueur de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, soit le 19 juin 2008, et qu?en application des articles 641 et 642 du code de procédure civile, il expire le jour de la dernière année qui porte le même quantième que le jour de l?acte, de l?événement, de la décision ou de la notification qui fait courir le délai. Les délais expirant à 24 heures, elle en déduit que le délai de prescription applicable en l?espèce expirait le 19 juin 2013 à 24 heures et rejette la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l?action.
Le pourvoi du mandant soutient avec succès que les règles de computation des délais de prescription doivent être distinguées de celles régissant les délais de procédure et que, conséquemment, les dispositions des articles 641 et 642 du code de procédure civile ne sont pas applicables aux délais de prescription.
La Cour de cassation accueille le pourvoi au visa des articles 1er, 2222, alinéa 2, 2228 et 2229 du code civil.

Agnès Maffre-Baugé, Maître de conférences à la faculté de droit d'Avignon


 Cass. 1re civ., 12 déc. 2018, n° 17-25.697, n° 1181 P + B + I


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