Pouvoirs du JEX contre le tiers saisi récalcitrant lors d'une saisie-attribution

  • Exécution forcée
Procédures civiles d'exécution 12 février 2019
Pouvoirs du JEX contre le tiers saisi récalcitrant lors d'une saisie-attribution

Le JEX ne peut condamner le tiers saisi à payer, au créancier ayant diligenté une saisie-attribution, les sommes qu'il détient s'il ne s'est pas reconnu ni n'a été jugé débiteur envers le débiteur saisi.

 

En soulevant un moyen d’office fondé sur l’article R. 211-9 du code des procédures civiles d’exécution, selon lequel, en cas de refus de paiement par le tiers saisi des sommes qu’il a reconnu devoir ou dont il a été jugé débiteur, la contestation est portée devant le JEX qui peut délivrer un titre exécutoire, la Cour de cassation rappelle que le tiers saisi, qui ne s’est pas reconnu débiteur au jour de la saisie-attribution ni n’a été jugé débiteur, ne peut être condamné au paiement.
Sur le fondement d’une sentence arbitrale rendue exécutoire par un arrêt d’une cour d’appel, une société fait pratiquer, le 3 novembre 2011, une saisie-attribution entre les mains d’une banque au préjudice de la société débitrice pour avoir paiement d’une certaine somme. Cette saisie intervient après une saisie-attribution pratiquée le 27 juillet 2011 par d’autres créanciers, dont la mainlevée a été ordonnée par un jugement du 27 octobre 2011, ainsi que deux saisies-attributions, diligentées à l’initiative de la société les 12 et 28 octobre 2011, qui faisaient l’objet au jour de la saisie du 3 novembre 2011 de contestations de la part de la société débitrice. Un jugement du 15 décembre 2011 a ordonné la mainlevée de la saisie-attribution du 12 octobre 2011. Par acte du 10 juillet 2015, la banque tiers saisi demande au JEX d’annuler la saisie-attribution du 3 novembre 2011 et, à titre subsidiaire, de constater qu’elle n’est pas personnellement débitrice de la société saisissante.
Pour condamner la banque tiers saisi à payer à la société saisissante la somme correspondant au montant des fonds disponibles entre ses mains du fait de la mainlevée de la saisie-attribution du 12 octobre 2011, la cour d’appel retient que les décisions du JEX sont exécutoires de plein droit, peu important qu’elles ne soient pas irrévocables et que la décision de mainlevée d’une saisie-attribution emporte suppression de tout effet d’indisponibilité au profit du saisissant dès sa notification. Dès lors, la mainlevée ordonnée par le jugement du 15 décembre 2011 de la saisie du 12 octobre 2011 a eu pour effet de rendre les fonds disponibles pour être attribués à la saisie postérieure du 28 octobre 2011, puis attribués, à la suite d’un jugement de mainlevée de cette saisie rendu le 6 janvier 2012, à la saisie du 3 novembre 2011.
Le pourvoi de la banque tiers saisi soutient que seule une décision définitive du JEX peut priver d’effet une saisie-attribution et entraîner l’affectation des fonds appréhendés par cette saisie à une saisie-attribution ultérieure. Il estime également que les sommes saisies avaient été présumées affectées à la mission diplomatique de l’État débiteur, qui bénéficiait d’une immunité d’exécution rendant les sommes insaisissables.
L’arrêt d’appel est cassé au visa de l’article R. 211-9 précité. Soulevant un moyen d’office, la Cour de cassation rappelle que le tiers saisi ne peut être condamné à payer la somme saisie que s’il a reconnu devoir quelque somme lors de la saisie-attribution litigieuse ou s’il en a été jugé débiteur.


Annie Baland, Président de chambre honoraire à la Cour d'appel de Paris


 Cass. 2e civ., 10 janv. 2019, n° 17-21.313, n° 8 P + B