IMPACTS DE LA LOI N°2024-322 du 09 AVRIL 2024

  • Constat
  • mesures conservatoires
  • procédures civiles d'exécution

MESURE CONSERVATOIRE ET SYNDIC DE COPROPRIÉTÉ

 

A titre liminaire, il semble essentiel de rappeler qu’une mesure conservatoire permet au créancier ayant une créance fondée en son principe de maintenir les biens en l’état dans le patrimoine du débiteur face à une menace dans le recouvrement. Ce mécanisme permet de lutter contre l’organisation par le débiteur de son insolvabilité. Ces mesures conservatoires peuvent prendre deux formes : les saisies conservatoires ou les suretés judiciaires.

 

  1. Le principe

 

En principe, pour pratiquer une mesure conservatoire, il faut que le créancier (ayant une créance fondée en son principe) demande l’autorisation au juge de la pratiquer sans commandement préalable, et qu’il justifie d’un péril dans le recouvrement, selon l’article L.511-1 du Code des procédures civiles d’exécution.

 

  1. Nouvelle exception : les charges de copropriétés

 

Dans certains cas énumérés par l’article L.511-2 du code précité, l’autorisation du juge n’est pas nécessaire. C’est notamment le cas depuis la loi n°2024-322 du 9 avril 2024, entrée en vigueur le 11 avril 2024 modifiant l’article L.511-2 du Code de procédures civiles d’exécution, des charges de copropriété impayées, mentionnées à l’article 19-2 de la loi du 10 juillet 1965.  

 

Les charges en question :

Selon l’article 14-1 de la loi du 10 juillet 1965, dans une copropriété d’immeuble bâti, pour faire face aux dépenses courantes, l’assemblée générale des copropriétaires vote un budget prévisionnel. Les copropriétaires doivent en principe verser des provisions égales au quart du budget voté.

 

Désormais, lorsque ces provisions pour charges courantes (ainsi que les arriérés de ces charges) ne sont pas payées par un copropriétaire, le syndic peut engager une mesure conservatoire sur ces sommes sans autorisation préalable du juge.

Le commissaire de justice devra s’assurer que les sommes dont se prévaut le syndic sont relatives à des charges courantes et non des charges relatives aux dépenses exceptionnelles.

 

La procédure :

En dehors de toute mesure conservatoire, pour condamner un copropriétaire défaillant au paiement des charges exigibles, c’est l’article 19-2 de la loi du 10 juillet 1965 qui s’applique. Cet article précise qu’à défaut de règlement d’une provision à sa date d’exigibilité, « les autres provisions non encore échues (…) ainsi que les sommes restant dues appelées au titre des exercices précédents après approbation des comptes deviennent immédiatement exigibles », et ce après la notification d’une mise en demeure restée infructueuse passé un délai de 30 jours.

 

Ainsi, la Chambre nationale des commissaires de justice dans une Recommandation « Pratique sur la nouvelle saisie conservatoire des charges de copropriété » du 30 avril 2024 préconise de procéder au même titre que l’article 19-2 précité, à la notification d’une mise en demeure avant de diligenter une mesure conservatoire sur les provisions impayées.

 

La Chambre nationale des commissaires de justice, précise que les commissaires de justice devront se faire communiquer toutes les pièces nécessaires pour la mise en œuvre d’une telle mesure conservatoire (décompte actualisé, mise en demeure, contrat de syndic …). Aucune précision n’est apportée par les textes concernant les documents nécessaires.

Attention, lorsque la saisie conservatoire pourra être diligentée, il faudra veiller selon l’article R.511-7 du Code des procédures civiles d’exécution à ce que le syndic, dans le délai d’un mois qui suit l’exécution de la mesure conservatoire, introduise une procédure ou accomplisse les formalités nécessaires à l’obtention d’un titre exécutoire contre le copropriétaire défaillant, sous peine de caducité.

 

La saisie conservatoire :

« La saisie conservatoire peut porter sur tous les biens mobiliers, corporels ou incorporels, appartenant au débiteur. Elle les rend indisponibles (…) », article L.521-1 du Code des procédures civiles d’exécution. En pratique, dans le cadre des charges de copropriétés impayées, il s’agira sans doute le plus souvent d’une saisie conservatoire de compte bancaire. A ce titre, les commissaires de justice pourront se heurter à l’absence de coordonnées bancaires du débiteur. Sans titre exécutoire ou décision de justice autorisant une saisie conservatoire sur comptes bancaires, il est impossible d’interroger le FICOBA (article L.152-1 du Code des procédures civiles d’exécution et L151 A du Livre des procédures fiscales). Dans ce cas pour poursuivre la mesure conservatoire il faudra saisir le juge de l’exécution pour qu’il autorise à procéder à une telle mesure sur les comptes bancaires au nom du copropriétaire débiteur, afin de pouvoir interroger le FICOBA.

 

 

ACCES DES COMMISSAIRES DE JUSTICE AUX PARTIES COMMUNES D’UN IMMEUBLE EN COPROPRIÉTÉ

 

 

Avant la loi du 9 avril 2024, les commissaires de justice pouvaient accéder aux parties communes des immeubles d’habitation, dans le cadre de leur mission de signification et d’exécution (selon l’article L.126-14 du code de la construction et de l’habitation). Désormais ils peuvent également y accéder pour leur mission d’affichage. Cette faculté a été ajoutée par l’article 36 de la loi du 9 avril 2024.

 

Ainsi, dans le cadre de leur mission de signification, d’exécution ou d’affichage, le syndic doit permettre aux commissaires de justice d’accéder aux parties communes. Ils ont également accès aux boites aux lettres particulières.

 

Cependant, dans certains cas, les parties communes ne sont pas accessibles librement depuis la voie publique. Dans ce cas, le commissaire de justice ou clerc assermenté adresse par tout moyen au syndic une demande d’accès en vertu de l’article R.126-5 du Code de la construction et de l’habitation. Le syndic doit remettre au commissaire de justice ou au clerc assermenté un moyen matériel d’accès ou lui transmettre les codes d’entrée. Cette transmission doit intervenir dans un délai maximal de cinq jours ouvrables à compter de la réception de sa demande selon l’article R.126-6 alinéa 1er du Code de la construction et de l’habitation, en échange un récépissé permettant d’établir la preuve de la remise ou la transmission sera transmis au syndic, selon l’article R.126-6 alinéa 2 du Code précité.